La DMA leur impose une série d’obligations, telles que l’interdiction de favoriser leurs propres services, de limiter l’interopérabilité ou de collecter des données sans consentement. En cas de non-respect, elles s’exposent à des amendes pouvant atteindre 10 % de leur chiffre d’affaires mondial ou à des mesures correctives plus sévères, comme le démantèlement ou l’interdiction temporaire. La DMA vise à favoriser la concurrence, l’innovation et la diversité dans le secteur numérique européen.
Lundi 3 juillet était la date limite pour que les grandes plateformes technologiques du monde notifient à l'Union européenne (UE) qu'elles sont des « gatekeepers » au sens de la loi sur les marchés numériques (Digital Markets Act, DMA). Les entreprises qui ont déclaré atteindre les seuils sont les suivantes :
- Alphabet
- Amazon
- Apple
- ByteDance
- Meta
- Microsoft
- Samsung
Ces entreprises ont une taille de marché qui a une incidence sur le marché intérieur (chiffre d'affaires annuel en Europe d'au moins 7,5 milliards d'euros au cours des trois derniers exercices ou juste valeur marchande d'au moins 75 milliards d'euros au cours du dernier exercice et activités dans au moins trois États membres) et ont servi plus de 45 millions d'utilisateurs finaux actifs mensuels et plus de 10 000 utilisateurs professionnels actifs annuels dans l'UE au cours des trois dernières années sur un certain nombre de services de plateforme essentiels, tels que les moteurs de recherche, les services de réseautage social et les systèmes d'exploitation.
Selon TikTok, bien qu'il réponde aux critères quantitatifs de la DMA, il ne satisfait pas aux exigences générales fixées par le règlement, qui prévoit qu'un « gatekeeper » doit disposer d'une « plateforme inévitable pour mener des activités en ligne dans l'UE » et être une passerelle « bien établie » entre les consommateurs et les entreprises.
La déclaration publiée par le commissaire européen Thierry Breton indique que la DMA « va maintenant vérifier leurs soumissions et désigner les gatekeepers pour des services de plateforme spécifiques d'ici le 6 septembre ». Après cela, les entreprises n'auront que six mois pour se conformer aux règles de la DMA.
- Ils ne pourront plus bloquer les utilisateurs dans leur écosystème ;
- ils ne pourront plus décider quelles applications doivent être préinstallées sur vos appareils, ni quel magasin d'applications vous devez utiliser ;
- ils ne pourront plus s'auto-préférer, c'est-à-dire exploiter l'avantage d'être le gatekeepers en traitant leurs propres produits et services plus favorablement ;
- Leurs applications de messagerie devront interopérer avec d'autres.
Les consommateurs auront plus de choix de services, plus de possibilités de changer de fournisseur, et bénéficieront de meilleurs prix et de services de meilleure qualité.
En cas d'infraction, les entreprises risquent une amende pouvant atteindre 10 % de leur chiffre d'affaires mondial total, 20 % en cas de récidive, et des manquements répétés pourraient conduire la Commission à « ouvrir une enquête de marché et, si nécessaire, à imposer des mesures correctives comportementales ou structurelles ». Apple, qui affirme que la nouvelle loi « créera des vulnérabilités inutiles en matière de sécurité et de protection de la vie privée pour nos utilisateurs », aurait prévu d'autoriser les boutiques d'applications tierces dans iOS 17, mais avec des restrictions possibles, comme le fait de ne les autoriser qu'en Europe ou d'imposer des exigences en matière de sécurité.
Meta a déclaré la semaine dernière qu'elle permettrait aux utilisateurs de télécharger des applications via des publicités Facebook en Europe.
Meta explique aux développeurs participant au projet pilote qu'en hébergeant leurs applications Android et en permettant aux utilisateurs de Facebook de les télécharger directement sans être renvoyés au Play Store, ils obtiendront des taux de conversion plus élevés pour leurs publicités d'installation d'applications. Au moins dans un premier temps, Meta ne prévoit pas de prélever une partie des revenus des applications participantes, de sorte que les développeurs participant au projet pilote pourront toujours utiliser les systèmes de facturation de leur choix.
Un porte-parole de Meta, Tom Channick, a confirmé le projet dans un communiqué : « Nous avons toujours voulu aider les développeurs à distribuer leurs applications, et de nouvelles options permettraient d'accroître la concurrence dans ce domaine. Les développeurs méritent d'avoir plus de moyens pour faire parvenir facilement leurs applications aux personnes qui les veulent. »7 companies have notified the 🇪🇺 Commission that they meet the #Gatekeepers thresholds under the Digital Markets Act (#DMA):
— Thierry Breton (@ThierryBreton) July 4, 2023
Alphabet
Amazon
Apple
ByteDance
Meta
Microsoft
Samsung
🔜 Following our review process, official designation will be announced no later than 6 September pic.twitter.com/1qr5Scly0S
Meta n'est pas le seul à vouloir devenir un distributeur d'applications mobiles lorsque le DMA de l'UE entrera en vigueur. En mars, Microsoft a déclaré qu'il espérait lancer un magasin d'applications alternatif pour les jeux sur iOS et Android en Europe l'année prochaine. En ouvrant sa propre boutique, Microsoft pourrait proposer ses propres jeux, applications et services sans être soumis aux règles de l'App Store d'Apple.
Selon Phil Spencer, directeur général de Microsoft Gaming, Microsoft souhaite ouvrir son propre magasin d'applications pour iOS et Android. En attendant que son acquisition d'Activision Blizzard pour 75 milliards de dollars soit approuvée, cette boutique pourrait être mise en service au plus tôt en 2024.
Proposer sa propre vitrine d'applications serait utile à Microsoft à bien des égards, notamment pour permettre au « cloud gaming » de se développer. Selon les règles en vigueur, Apple exige que les services de "cloud gaming" listent chaque jeu dans l'App Store plutôt que d'opérer à partir d'une seule application, comme Netflix. Les jeux en cloud sont possibles sur l'iPhone, mais via un navigateur web au lieu d'une application native dédiée.
Une régulation ambitieuse mais complexe des géants du numérique
Le DMA est une initiative louable de l’Union européenne pour tenter de rééquilibrer le rapport de force entre les géants du numérique et les autres acteurs du marché. Il vise à garantir des conditions de concurrence équitables, à stimuler l’innovation et à renforcer le choix des consommateurs. Toutefois, le DMA soulève aussi des questions et des défis, tant sur le plan juridique que pratique.
Sur le plan juridique, le DMA pourrait se heurter à des contestations de la part des plateformes concernées, qui pourraient invoquer le respect de la libre concurrence, de la liberté d’entreprendre ou de la protection de la propriété intellectuelle. Le DMA devra également être compatible avec les autres législations européennes ou nationales relatives au numérique, comme le règlement général sur la protection des données (RGPD) ou la loi française contre les contenus haineux en ligne (loi Avia).
Sur le plan pratique, le DMA devra être appliqué de manière efficace et proportionnée par la Commission européenne, qui sera chargée de surveiller le respect des obligations et d’imposer les sanctions. Le DMA devra également être adapté aux évolutions rapides et constantes du secteur numérique, qui pourrait voir émerger de nouveaux acteurs ou de nouveaux services susceptibles d’entrer dans son champ d’application.
Le DMA pourrait avoir des effets positifs sur le secteur numérique européen, en favorisant l’émergence de nouvelles plateformes innovantes et compétitives, capables de proposer des alternatives crédibles aux géants du numérique. Il pourrait par ailleurs profiter aux consommateurs européens, en leur offrant plus de choix, plus de transparence et plus de contrôle sur leurs données personnelles. Enfin, il pourrait contribuer à renforcer les valeurs démocratiques et les droits fondamentaux dans l’espace numérique européen.
Toutefois, le DMA pourrait aussi avoir des effets négatifs ou indésirables, comme une réduction de la qualité ou de la diversité des services offerts par les plateformes concernées, une augmentation des prix ou des coûts pour les utilisateurs ou les entreprises, ou encore une fragmentation du marché intérieur numérique.
Source : Commission Européenne
Et vous ?
Quels sont les risques du DMA pour la qualité, la sécurité et l’accessibilité des services numériques ?
Quels sont les enjeux démocratiques et éthiques liés au DMA et comment sont-ils pris en compte ?
Quels sont selon vous les avantages et les inconvénients du DMA par rapport aux autres initiatives de régulation des géants du numérique ?
Quels sont les défis et les opportunités du DMA pour les petites et moyennes entreprises et les start-up du secteur numérique européen ?
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